Houbre Gilbert

Houbre Gilbert
Houbre Gilbert

Texte de l’artiste

Il ne s’agit pas de s’arrêter. Il faut marcher. Migrer. Traverser encore. S’arrêter, s’asseoir, dans un jour de paternité qui colorera le monde, un jour lointain, mais ailleurs c’est certain. L’homme qui marche ne porte rien. La lumière lui fait une auréole et le dégage de l’ombre, l’origine de sa force, que pourtant il n’aime pas, qui le chasse devant lui, et le fait se cogner à la mort, en noir pur. Interdit. Néant. C’est d’aujourd’hui, et pourtant de si longtemps dans la main du peintre. Déjà bien avant la tempête.
L’art de Gilbert Houbre, né de la gravure, avec son vocabulaire d’images, d’humanité, et sa syntaxe du trait, de l’ombre et de l’obscurcissement, ne s’arrête pas, lui non plus. Comme on n’arrête pas la marche du monde. Car l’esprit n’est d’aucun temps, nous rappelle t’il en faisant se côtoyer avec une empathie affectueuse ces moments de la mémoire profonde, celle qui est inscrite dans le corps, qui autant que les yeux peuvent voir, est jusqu’au bout colorée de sang, du ciel le plus bleu, de l’herbe lumineuse, claire, de l’aube, des jaunes orangés du couchant autant que des contrastes exacerbés de l’intime. Les âges se mêlent, l’enfance, la présence de la mère, et les variations d’éclairage aux extrêmes de la lumière sont les seules marques apparentes du temps, comme si la vie n’était que d’un seul jour.
Comme si une toile de G. Houbre devait être à elle seule, dans son abstraction habitée, un équivalent total de l’expérience, grâce à la liberté du geste pictural, de plus en plus libéré ostensiblement du souci de la représentation. Je ne peux que reprendre ces mots confiés récemment: « mon travail, c’est vraiment au plus profond une question d’assemblage de formes…de vides et de pleins, … essayer de lâcher prise,.. vers l’abstraction », ou encore : « … atteindre une vérité picturale plus qu’un sens sûrement, dans la mesure où un certain équilibre s’installe dans le travail…un contentement de l’œil… un oubli de la main, et dans cette série, c’était vraiment la rencontre du noir et de la couleur ».
Mais on ne peut réduire l’artiste à toute forme. Regardez ce linceul africain porté en croix, au -dessus duquel une vapeur se transforme en tornade azurée dans un ciel de nuit noire, regardez ce visage comme énucléé, vidé de toute vie, et à côté de lui, la jeune fille, sereine, porter la main à ses cheveux, en une grâce inespérée. Ailleurs encore, voyez cette autre main, dans la lumière, la paume vers le ciel, et au-dessus, l’offrande, du bout des doigts. La petite attend, le front illuminé. Une incantation silencieuse qui, au regard, fait sens.
Si la matière, la couleur, la forme inspirent et guident Gilbert Houbre, le souffle de sa peinture n’est pas un effet de l’art. Il nous relie les uns aux autres, il nous révèle vivants, il est nourriture.

Jean-Marc Pionchon

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